samedi 30 avril 2011

DOUZIEME, TROSIEME ET QUATORZIEME SEANCES : L’UNIVERS UTOPIQUE


Nous avons consacré trois séances à la création d’un univers imaginaire et utopique. Après avoir lu des descriptions de lieux célèbres inventés par la littérature universelle – d’Homère à Italo Calvino en passant par Daniel Defoe – chaque élève a commencé à imaginer son propre univers utopique. La première approche de ce monde fut visuelle : le dessiner, le nommer, lui donner un drapeau, une monnaie, une langue, des us et des coutumes. Ensuite, les élèves échangèrent leurs univers entre eux dans le but d’explorer une terre qui leur était inconnue. Dans la peau d’un explorateur, ils durent rédiger un carnet de voyage dans le style des grands découvreurs de tous les temps. Enfin, pour clore la séquence, les textes furent recopiés sur des « parchemins », puis roulés à l’intérieur d’une bouteille et déposés un peu partout dans le collège, tels des messages dans des bouteilles jetées à la mer. A la merci de celui qui les trouvera – ou non – et qui peut-être osera en lire le contenu… Voici quelques extraits que j’ai pu récupérer, de simples fragments, comme épargnés par les eaux…

C’était un jour normal, je venais à l’école quand soudain la terre s’ouvrit sous mes pieds...
Kira dans l’univers de Loui, 3°4, Saint-Exupéry

Je suis parvenu sur cette île en lisant une légende magrébine qui m’a emmené à travers des beaux paysages de l’Orient…
Dizolélé dans l’univers d’Hichem, 3e3, Collège Théodore Monod

29 mai 600.000 : je partais dans la très nuageuse ville d’Evisely à la recherche de la pierre qui enlève le bonheur.
Keisha dans l’univers d’Yvelise, 3e4, Prévert

J’arrive dans ce monde, je ne sais pas où je suis ni comment je suis arrivé. Moi, Jason, pour la première fois, j’ai peur… Je suis sous l’eau mais je respire. Pourquoi suis-je ici ? Je me promène, j’explore, je regarde.
Lidya dans l’univers de Céline, 3°4, Saint-Exupéry

Un jour pour aller à la troisième lune de ma planète, j’ai pris mon vaisseau-moteur. Tout d’un coup pendant le voyage, j’ai senti une forte secousse. Je regardais par le rétroviseur et j’ai vu un trou noir derrière moi : il m’attirait de plus en plus et il m’emporta… 
Camil dans l’univers de Lou, 4°6, Collège Le Parc

Dans ce nouveau monde, pas loin de moi, j’ai vu un enterrement, mais les habitants ne pleuraient pas, j’ai entendu dire que mourir chez eux était une nouvelle vie.
Bénédicte dans l’univers de Christophe, 3e4, Prévert

Mon nom est Laura et à dos d’oiseau j’arrivai au village Trybet.
Lucas dans l’univers d’Adeline, 3°4, Saint-Exupéry

Au milieu du désert, j’ai trouvé une porte… J’ai sauté dans le vide et sans savoir comment je me retrouvai dans une forêt
Logan dans l’univers d’Ibrahim, 4°6, Collège Le Parc

Dans cette planète, il y a 2 soleils qui se croisent en permanence et une nuit dure 12 jours.
Frédérique dans l’univers d’Hugo, 3 e 4, Prévert

Sans savoir comment, je me suis retrouvée dans cette île en forme de crâne et habitée par une créature horrible qui se trouve dans une grotte.

Melvin dans l’univers de Sylvain, 3e3, Collège Théodore Monod


Quand j’ai ouvert les yeux, je me suis retrouvé presque dans le noir tellement les feuilles des arbres couvraient le ciel. J’étais ligoté dans la forêt de femmes.
Clémence dans l’univers de Hocine, 4°6, Collège Le Parc

Un matin je me levai sur le sable, et en ouvrant les yeux, je compris que je m’étais échoué sur une île déserte…
Anonyme dans l’univers d’anonyme, 3°4, Saint-Exupéry

Je fus très surpris quand dans la mer de Notibe, j’ai pu voir une énorme baleine à cinq têtes. Un homme poisson me dit : « Ne fais pas attention. C’est une baleine qui se nourrit tous les deux mille ans et qu’à chaque fois qu’on lui coupe la tête, il y en a deux qui repoussent ».
Hugo dans l’univers de Mallaury, 3e4, Prévert

J’ai découvert une porte qui mène à un endroit sans saison. De l’autre coté j’ai découvert un centaure à terre. Je m’approchai tout doucement, je le contournai et je continuai mon chemin.
Leslie dans l’univers de Bilel, 4°6, Collège Le Parc

Je ne peux pas décrire ce monde en si peu de phrases, mais je peux vous assurer que c’est une copie du Paradis, ou peut-être le Paradis lui- même. Mais maintenant que je pense, cela voudrait dire que je suis mort…
Betty dans l’univers de Laura, 3°4, Saint-Exupéry

Soudainement, j’entends des cris de guerre et j’aperçois des centaures avec des arcs qui venaient heureusement tuer des léopards à pelage blanc descendant des fameuses montagnes des cœurs brisés.
Christophe dans l’univers de Keisha, 3e4, Prévert

Etrange cette île : elle était un peu horizontale, un peu verticale.
Joury dans l’univers de Sylvain, 3e3, Collège Théodore Monod

Moi, désespéré, sans personne sur cette île, j’ai cru que jamais je ne survivrai, jusqu’au moment où j’ai vu cette jeune femme cachée derrière un buisson. Elle me ramena chez elle, me proposa à boire et à manger et me soigna. Plusieurs jours après, j’ai compris qu’ils n’étaient pas des gens normaux : ils avaient l’apparence des humains mais le soir ils se transformaient.
Laureen dans l’univers de Nicolas, 4°6, Collège Le Parc

Tout d’un coup, je tombai dans une espèce de tunnel immense et interminable… Au début j’ai cru à un mauvais rêve mais un crabe m’a pincé la jambe, et là, j’ai compris que je ne dormais pas.
Laura dans l’univers de Coralie, 3°4, Saint-Exupéry

Dans ce monde, jamais personne n’insulte son prochain… J’ai dû passer plusieurs mois pour m’adapter à eux, car dans le monde d’où je viens, on ne connaît pas l’amour et l’amitié.
Axel dans l’univers de Bénédicte, 3e4, Prévert

Après toutes ces découvertes, j’ai décidé d’y rester car je ne voulais pas me prendre la tête pour savoir comment j’allais rentrer chez moi.  
Antoine dans l’univers de Bouzned, 3e3, Collège Théodore Monod

Dans cette île les gens ne croient pas en Dieu : ils croient en l’amour.
Morgane dans l’univers de Laetitia, 4°6, Collège Le Parc

Contrairement au monde normal, dans ce royaume je n’avais pas besoin de dépenser de l’argent. Ici on achète tout en jouant une mélodie avec son instrument. Et on n’a pas besoin non plus de voitures, car dans ce monde on se déplace de note en note.
Franck dans l’univers de Claudia, 3°4, Saint-Exupéry

J’avais tellement faim que j’ai décidé de manger un minotaure.
Xavier dans l’univers de Sherazade, 3e3, Collège Théodore Monod

On m’a envoyée ici car je dois accomplir une mission. Dans ce monde, il y a l’arc-en-ciel, et avant-hier je me suis battu avec un lion… Il m’a mordu au niveau de la jambe.
Amine dans l’univers d’Alexandre, 3°4, Saint-Exupéry

Après plusieurs heures de marche j’arrive devant un fleuve, mais je ne peux pas m’en approcher car c’est un fleuve de feu. Soudain, de l’autre coté du fleuve, je vois des personnes qui souffrent, qui brûlent, et je peux entendre aussi d’horribles cris. 
Hélène dans l’univers de Bryan, 4°6, Collège Le Parc

Dans ce pays, il était interdit de pleurer, et comme je voulais rentrer chez moi, c’était dur de cacher ma tristesse.
Youssef dans l’univers de Laura, 3e3, Collège Théodore Monod

Même si je commençais à m’habituer à ce nouvel univers, vers la fin de ce voyage, je voulais rentrer sur terre pour retrouver ma famille…
Song dans l’univers d’Alex, 3 e 4, Prévert

jeudi 17 mars 2011

ONZIEME SEANCE : DEBLOQUER L’ECRITURE

Aujourd’hui, j’avais prévu une activité d’écriture à partir de photos. Tout d’un coup, à la dernière minute, je change d’idée ; le travail de création est soumis aux imprévus : depuis quelques jours déjà, je suis bloqué dans le roman que je suis en train d’écrire. Chaque matin, je me retrouve devant la feuille blanche : les mots ne viennent pas. Ils ne veulent pas venir ? Ne peuvent pas venir ? Ne savent pas venir ? C’est un roman qui parle de nos villes ; de celles qui ont été détruites dans l’histoire de l’humanité : Pompéi, Troie, Lisbonne, Hiroshima, Port au Prince, Tchernobyl, Tokyo… D’ailleurs, pendant que je me penchais sur ces catastrophes, le séisme et le tsunami japonais surgirent dans l’actualité. Soudain, le réel dépasse la fiction – c’est peut-être cela qui me paralyse... Dans le roman, mon personnage se trouve dans le musée de Madrid, face au tableau Guernica. C’est là que je suis bloqué.


La veille, je décide d’utiliser cette « panne » d’inspiration pour construire ma séance d’atelier : in extremis, je change la séance, et leur propose d’écrire à partir du tableau de Picasso. D’entrée de jeu, j’explique aux jeunes ce qui m’arrive. On parle des villes détruites, on évoque évidemment Fukushima, le Japon, les catastrophes provoquées par la nature, celles provoquées par l’homme. Je montre Guernica au vidéoprojecteur ­– miracle de la technologie, qui produit tout à la fois le meilleur et le pire. Je propose différents jeux d’écriture autour du tableau. Ils se mettent au travail, avec toujours le même plaisir, la même curiosité. Mais aujourd’hui, on sent une jubilation, une générosité inhabituelle et naïve : cette fois, ils écrivent pour moi, pour m’aider, pour me dépanner, en venant à mon secours… Leurs textes sont touchants, émouvants. Je ne les accrocherai pas car pendant que je les lis, je me rends compte que cette-fois ci ils n’ont pas cherché la réussite ou la performance littéraire : tout simplement, ils ont cherché à m’aider. Et je dois avouer que finalement, ils sont arrivés à le faire : jeudi soir, après mes séances dans les collèges, je rentre chez moi et je reprends mon roman. Et là, les mots viennent, les mots surgissent, les mots me rejoignent. Je les avais perdus, et c’est eux – ces jeunes du 93 qu’on accuse d’être sans langage –, qui me les ont rendus…

vendredi 11 mars 2011

NEUVIEME ET DIXIEME SEANCES : LE REGARD SENSIBLE

Lors des dernières séances, nous avons travaillé à partir de photos, en essayant d’utiliser ces images comme déclencheur d’écriture. Après avoir déchiffré collectivement quelques photographies bien choisies, les élèves se lancent dans l’écriture. La consigne est d’aborder chaque photo selon trois approches possibles : 1) développer ce qui touche, attire, captive, interpelle l’œil ou pique l’esprit dans la photographie, c’est ce que Barthes nomme le « punctum » ; 2) décrire le hors-cadre de la photo, en imaginant tout ce que le photographe ne montre pas, ce qui est en dehors du cadre ; 3) créer un monologue intime pour l’un des personnages de la photo, en tentant de faire surgir de l’image son discours intérieur, son soliloque… Dans le déluge permanent, presque obscène, d’images médiatisées, qui finit par nous rendre assez indifférents aux images du monde qui nous entoure, il me semble que ce travail de décryptage permet de développer ce que j’appelle le « regard sensible » : prendre le temps de regarder les photographies, de les penser, de les réinventer. C’est aussi un plaisir : celui de s’approprier les images pour mieux les intérioriser. Car finalement l’écriture, c’est avant tout une affaire de regard sur le monde, et ce regard est multiple…

PHOTO N°1

Cette photo révèle en moi une envie de manifester avec eux.
Catherine, 3e4, Prévert

C’est qui me touche c’est l’air libéré et heureux des lycéens. Ils sont heureux comme si c’était gagné d’avance. Et puis il y a cette fille au milieu de tous ces garçons. Elle est heureuse d’être ici.
Betty, 3°4, Saint-Exupéry

Les poings levés de ces étudiants m’inspirent la force. Leurs regards me disent qu’ils se battront jusqu’au bout. Cette image signifie pour moi que le temps de la soumission est fini…
Keisha, 3e4, Prévert

PHOTO N°2

Des objets en suspension. Des vitres brisées. Du sang qui coule du robinet. Un bruit qui fait mal aux oreilles.
Thomas, 3°4, Saint-Exupéry

« Je suis ton amie qui est mort. Je viens vers toi parce que tu m’as trahie. C’est ta faute si je suis morte. Tu devrais avoir honte. Je viendrai t’accompagner tous les soirs dans ton sommeil. »
Paule Daniela, 3e3, Collège Théodore Monod  

Il pourrait y avoir quelques rats à gauche. Une porte qui grince vers la droite. Au plafond une ampoule morte qui ne fonctionne plus et qui pend. 
Katharina, 3e4, Prévert

« J’ai peur. Je crie. Je veux partir. Quitter cet endroit obscur. J’entends des personnes crier mais je ne vois personne. Je suis stressée et énervée. Des fantômes hantent cet endroit. Suis-je folle ? »
Adeline, 3°4, Saint-Exupéry

Ce qui me touche c’est la différence d’émotion qui vient de la bouche du fantôme qui exprime de la méchanceté et la bouche de la fille qui exprime de la peur.
Nicolas, 4°6, Collège Le Parc

PHOTO N°3

La hauteur. L’immensité. La liberté. L’air. La profondeur. Le vide.
Adeline, 3°4, Saint-Exupéry

« Je suis condamnée à errer sur cette œuvre architecturale jusqu’à la fin de ma vie. Le seul moyen de m’évader est de sauter. Voilà à quoi elle se résume ma vie : rester éternellement ici jusqu’à la mort. »
Morgane, 4°6, Collège Le Parc

Le vide et la couleur du ciel. Un bleu intense qui ne finit pas. Il n’y a pas le moindre nuage. On dirait que le temps s’est arrêté.
Céline, 3°4, Saint-Exupéry

J’imagine de l’eau en bas. Le chemin blanc qui continue encore loin. Des personnes devant eux, qui ouvrent la porte du paradis. Derrière le photographe un nuage. A gauche, du bleu partout. Devant : la simplicité. J’imagine le bonheur. Le vide. L’insouciance.
Lauriane, 3e4, Prévert

J’imagine le personnage en orange qui essaie de se suicider. Les personnes de derrière essaient de l’empêcher en lui donnant de bons arguments pour ne pas le faire.
Lysianne, 3°4, Saint-Exupéry

Cette photo provoque de la surprise en moi.
Axel, 3e4, Prévert

J’imagine que l’escalier est sans fin, que les gens qui sont dessus sont comme enfermés dans une spirale.
Laetitia, 4°6, Collège Le Parc

Ce qui m’interpelle, c’est la couleur bleue du ciel.
Youssef, 4°5, 3e3, Collège Théodore Monod  

Cette photo inspire le néant.
Clémence, 4°6, Collège Le Parc

PHOTO N°4

Ce qui m’attire, c’est le mélange des soldats et des habitants de la ville. Ces balles affichées publiquement. L’enfant en vélo qui fait comme si de rien n’était. Les liens entre la force et la faiblesse.
Laurinne, 3e4, Prévert

Ce qui me touche, c’est les balles par terre qui ne sont pas rangées, contrairement au gens qui ont les jambes très droites.
Laetitia, 4°6, Collège Le Parc

J’imagine des soldats qui arrêtent des dealers. A gauche je pense qu’il y a pleins de caisses remplies des drogue et des cigarettes. Je pense qu’il y a partout de soldats qui arrêtent des personnes qui vendaient des armes…
Raachel, 3e3, Collège Théodore Monod  

Je pense que ce sont de militaires qui arrêtent des trafiquants d’armes en pleine rue quelque part en Afrique. Le ciel pourrait être bleu. Peut être qu’il fait beau.
Keisha, 3e4, Prévert

Savoir que tant des balles ont été utilisées, c’est affreux...
Morgane, 4°6, Collège Le Parc

PHOTO N°5

J’ai mal pour lui.
Rabia, 3e4, Prévert

Je vois les yeux du boxeur qui vient de donner un coup à son adversaire. Même s’il veut le mettre K.O., il semble pourtant avoir de la peine à travers ses yeux pendant qu’il lui donne ce coup fatal.
Lidya, 3°4, Saint-Exupéry

Autour, la foule qui encourage les boxeurs. Le ring qui tremble sous les pieds des combattants. Les lumières accrochées au plafond qui éclairent le ring. Les coachs des boxeurs qui les encouragent respectivement.
Axel, 3e4, Prévert

Ce qui me touche, c’est les yeux de celui qui se fait frapper : son regard est complètement ailleurs…
Raachel, 3e3, Collège Théodore Monod  

Ce qui m’interpelle c’est le geste du gant qui essaie de le retenir, car même s’ils sont en train de combattre, il y a toujours un respect entre eux.
Mallaury, 3e4, Prévert

PHOTO N°6

« J’aurais aimé être comme toute les petites filles : jouer, aller à l’école et faire tout ce que font les filles de mon âge. J’aimerais tant être comme eux. Pouvoir être heureuse et rester toujours innocente. Et surtout ne pas avoir à faire cette guerre. J’aimerais tant récupérer cette innocence qu’ils m’ont volé. »
Naomie, 3e4, Prévert

Ce qui me touche sur cette photo c’est que ces femmes et ces enfants, et surtout cette petite fille qu’on voit au premier plan, serrent leurs mains sur les barbelés… Elle a les larmes aux yeux. Ça se voit qu’elle est triste comme si elle était privée du monde. Le seul qui arrive à passer c’est l’arbre au bout… Lui, il n’aura pas mal…
Quentin, 3°4, Saint-Exupéry

Je trouve captivant la main de l’enfant sur le fil de fer.
Bryan, 4°6, Collège Le Parc

J’imagine un kilomètre de fil barbelé à gauche. Des soldats américains à droite. Dans le ciel, j’imagine des avions qui envoient des bombes.
Rabia, 3e4, Prévert

De l’autre coté des barbelés, j’imagine la liberté.
Xavier, 3e3, Collège Théodore Monod  

Derrière les barbelés, il y a la guerre, des morts, des soldats, de gens qui crient. Et plus loin la peur, la terreur…
Coralie, 3°4, Saint-Exupéry

Ce qui me touche, c’est que les gens qui sont enfermés n’ont aucun mal à prendre entre leurs mains les fils barbelés.
Olivier, 3e4, Prévert

« Je devrais avoir honte de prendre cette petite fille en photo. On ne devrait pas avoir de souvenirs de telles horreurs. Cette fille semble si innocente. Elle doit avoir faim. Et soif… »
Lidya, 3°4, Saint-Exupéry

Ce qui m’interpelle vraiment dans cette image c’est les visages de ces personnes qui vivent dans la misère et qui ne peuvent même pas passer la frontière.
Xavier, 3e3, Collège Théodore Monod  

Il ne leur reste que la terreur.
Marc, 3°4, Saint-Exupéry

Une foule de migrants : ils ont pour seul espoir de traverser, pour pouvoir commencer de l’autre coté une nouvelle vie.
Kader, 3e4, Prévert

Nul ne peut s’échapper. La colère dans les regards de certains et le désespoir dans les yeux d’un enfant. A l’extérieur il y a un beau temps alors qu’à l’intérieur c’est sombre et triste. Les barbelés se présentent comme les barreaux d’une prison : ils sont sans fin. 
Céline, 3°4, Saint-Exupéry

PHOTO N°7

Malgré la guerre, il peut y avoir du bonheur. La force vers le haut alors que la sensibilité est en bas. Ça me fait ressentir un peu de joie, mais quand même de la peur. Ces soldats prêts à tirer et ce couple heureux… La haine et l’amour…
Lauriane, 3e4, Prévert

« C’est horrible ce bruit. Est-ce qu’ils sont partis ? Apparemment non. Sophie s’accroche à ma taille comme une folle ! Elle a peur ou c’est moi qui me fais des idées ? Non, elle a peur et moi aussi. Cette situation me terrifie : obligées de se cacher pour être sûres de rester en vie… »
Laura, 3°4, Saint-Exupéry

Ce qui me touche c’est le contraste entre le haut et le bas. En haut le char et en bas l’amour.
Dylan, 3e4, Prévert

« Aujourd’hui j’ai envie de tuer des gens. Je veux ma dose de sang »
Bouzned, 3e3, Collège Théodore Monod  

Ce qui m’attire le plus dans cette image est le couple en dessous du pont. Ils ont l’air de ne pas savoir qu’il y a une guerre car la jeune fille derrière sur la bicyclette sourit. Cette photo me donne l’impression que l’amour est plus fort que tout, y compris que la guerre.
Frédérique, 3e4, Prévert

Le point le plus captivant de l’image est ce jeune couple qui a l’air heureux malgré la guerre.
Lou, 4°6, Collège Le Parc

« A quelle heure je vais pouvoir rentrer chez moi ? Demain, vais-je vivre ? »
Catherine, 3e4, Prévert

samedi 12 février 2011

HUITIEME SEANCE : FRAGMENTS D’UN DISCOURS AMOUREUX



Le thème de la rupture est un thème vraiment riche pour commencer à aborder la fiction dans l’écriture. Car qu’est-ce que la fiction sinon une rupture avec la réalité, le quotidien, les habitudes de langage, pour se projeter dans un autre monde. C’est ce thème de la séparation, de l’abandon, du départ que je choisis donc pour introduire la fiction dans l’atelier. Donc, après avoir lu, puis commenté ensemble quelques textes et des extraits de films qui tournent autour de séparations (amoureuses, familiales, amicales), je propose aux élèves d'imaginer une rupture et d’écrire un texte autour de l’absence de l’autre. La consigne d'écriture – inspirée d’un exercice de style que Raymond Queneau appelle Logo-rallye – est simple : produire un texte en y intégrant progressivement des mots lancés à voix haute. Voici la liste, plutôt hétéroclites, des mots : hiver – toi – larmes – jamais – nuit – rouge – désormais – fossoyeur – portable – tristesse – mon – ciel – secret – normalement – clocher – adieu – solitude – aéroport – pourtant – faiblesse – sommeil – départ – cœur – prison – blessure – rage. Après avoir lu leurs textes, j’ai décidé de choisir quelques fragments et d’intituler cette séance « Fragments d’un discours amoureux » – en hommage au livre de Roland Barthes qui commence ainsi : « C’est donc un amoureux qui parle et qui dit : »

FRAGMENTS I


Je savais qu’un jour ou l’autre tu devrais bien me quitter.
Joury, 3e3, Collège Théodore Monod  

Depuis que je ne te vois plus mon cœur est vide, vide, vide !
Logan, 4°6, Collège Le Parc

Je ne parle plus. Je ne mange plus. Je ne vis plus.
Anonyme, 3°4, Saint-Exupéry

Encore en plein hiver je te cherche…
Rabia, 3e4, Collège Jacques Prévert

FRAGMENTS II



Tu vivais en moi...
Frédérique, 3e4, Collège Jacques Prévert

Maintenant je suis solitude…
Dylan, 3°4, Saint-Exupéry

Ma séparation avec toi est comme un vent d’hiver qui tombe du ciel.
Dizolélé, 3e3, Collège Théodore Monod  

Je t’attendrais… Reviens, je t’en prie...
Camil, 4°6, Collège Le Parc

FRAGMENTS III



Je sens une blessure en moi, une faiblesse mais aussi une énorme rage car on avait partagé de bons moments ensemble.
Hichem, 3e3, Collège Théodore Monod  

Comment pourrai-je vivre normalement ? Désormais je ne vis qu’avec pour seule compagnie, la solitude...
Kader, 3e4, Collège Jacques Prévert

Les blessures sont tellement profondes que je m’emprisonne sur moi-même tout seul.
Anonyme, 4°6, Collège Le Parc

Et pourtant dans mon cœur tu es là.
Adéline, 3°4, Saint-Exupéry

FRAGMENTS IV



J’aurais aimé que le fossoyeur creuse un trou plus grand pour qu’il puisse y avoir une place pour moi à tes cotés.
Sylvain, 3e3, Collège Théodore Monod  

Maintenant que tu n’es plus là, je suis rempli de tristesse.
Christophe, 3e4, Collège Jacques Prévert

Mon seul remède serait toi… Je suis tellement triste… Si tu savais… La solitude m’envahit…
Laetitia, 4°6, Collège Le Parc

Je pourrais continuer à t’écrire encore des pages et des pages mais tout a une fin et notre histoire s’arrête là.
Anonyme, 3°4, Saint-Exupéry

FRAGMENTS V



Tu as creusé une énorme place dans mon cœur alors qu’il était mort. Désormais tu n’es plus là et la tristesse de ne plus te voir m’envahit. Maintenant, je comprends ce que veut dire le mot « solitude »…
Shérazade, 3e3, Collège Théodore Monod  

Il faut que je parte loin à un endroit qui ne me fera pas penser à toi. La prison, peut-être ?
Laureen, 4°6, Collège Le Parc

Je t’attends toujours. Pourtant je sais que tu ne reviendras pas…
Song, 3e4, Collège Jacques Prévert

Finalement tu étais ma prison et maintenant je me sens libre.
Anonyme, 3°4, Saint-Exupéry

dimanche 30 janvier 2011

SIXIEME ET SEPTIEME SEANCES : FENETRES SUR LA VILLE


Après avoir vu et commenté quelques peintures de Hopper qui semblent éblouir les élèves, on se lance dans l’écriture à partir de l’idée de la fenêtre. Comme Hopper, on invente des fenêtres, on les imagine, on les crée... Que voit-on ? Que se passe-t-il derrière ? Les élèves écrivent des textes sidérants. C’est à mon tour d’être ébloui par leurs fenêtres…

FENETRES I


Par la fenêtre de ma chambre je vois un mur tagué qui rend hommage à un jeune innocent mort lors de son interpellation. Je vois un jeune qui se lève et qui porte les sacs de ma voisine qui revient du Franprix d’à coté. Il y a aussi des jeunes en scooter sur la roue arrière. Je peux sentir ma voisine du dessus qui fait son couscous. Je vois un homme et une petite fille fouiller dans les poubelles. Dans le bac à sable les enfants font du foot. Les jeunes squattent le muret pendant que Madame Brel les observe de sa fenêtre. Je vois dans le hall d’en face des jeunes qui fument et qui sont assis à galérer. Je vois le renoi du bâtiment 3 qui observe par sa fenêtre les filles. J’entends ma voisine crier car son mari la bat. Je le vois lui qui attend en bas de mon bâtiment.
Shérazade, 3e3, Collège Théodore Monod

Du haut de la Tour Eiffel, je vois tout Paris… Paris tantôt calme, tantôt agité. Des gens qui courent pour prendre le bus ou le RER, qui s’agitent avec les sacs de courses dans les mains. Je vois une femme qui crie car elle s’est fait voler son sac. Un homme qui pleure car il vient d’apprendre le décès d’une personne chère à ses yeux. Je vois aussi des chiens errants. Des pigeons crasseux. Des gens qui s’appellent, qui vont au restaurant. Je vois des magasins. Un cambriolage. Des voitures. Des camions ou encore des chevaux qui tractent une calèche. A Paris tout est illuminé. Je vois les Champs Elysées. Les Galerie Lafayette. La cathédrale Notre-Dame de Paris. La tour Montparnasse. La Seine. Mais ce que je vois de plus flagrant dans tout Paris c’est ce nombre indénombrable des voitures qui circulent, qui sont bloquées par les embouteillages. A Paris je vois le bassin du Trocadéro. Je vois des milliers de personnes qui ne me voient pas mais moi je les vois.
Lucas, 3e4, Collège Saint-Exupéry

Depuis la fenêtre du bureau du Principal pendant ton exclusion tu vois l’heure qui s’écoule. Tu vois ton professeur de français qui boit du café. Ton professeur d’histoire qui fume sa cigarette. Ta prof de techno qui fait de l’ordi. Un peu plus tard, tu vois des élèves qui sortent du Collège, heureux. Après tu vois tes parents qui arrivent, énervés. Pendant qu’ils parlent avec le Principal, tu vois un banc vide et malheureux qui te ressemble un peu…
Bilel, 4°6, Collège Le Parc

Depuis les fenêtres des mes lunettes Ray Ban je vois le ciel bien dégagé, la mer, le soleil. Je vois un hôtel. Je vois des douches, du sable et des maillots de bain. Je vois un vendeur de glaces. Je vois des oiseaux, des sourires et des amoureux. Je vois de la crème solaire. Je vois mes pieds. Mes jambes. Je sens le sel. Je vois aussi ma montre et mon portable. Je lis mon texto et alors je vois des mots… Maintenant je te vois toi qui pleures…
Lauriane, 3e4, Collège Jacques Prévert

FENETRES II


A travers la fenêtre de la clinique, je vois des patients qui attendent là, assis sur des fauteuils en attendant que quelqu’un vienne les chercher. J’observe encore et je vois des personnes allongées sur des lits qui roulent, elles sont emmenées en urgence par des ambulanciers… S’ils ne se dépêchent pas, ces malades risquent la mort. La clinique, quand on la regarde, on peut se dire : on est dans une jungle ou quoi ? De tous les cotés, les médecins sont en train de stresser pour savoir si leurs opérations sont réussies, si un des malades n’est pas déjà parti au ciel parce que il n’y a pas assez de médecins pour opérer tout de suite, si les nouveaux nés n’ont pas de problème. Il y a des jambes cassées, des fractures, des combats qui se sont mal finis, des greffés, des grippes, des contaminations, des maladies très graves…
Chloé, 4°6, Collège Le Parc

Par la fenêtre de ma chambre je vois des oiseaux dans l’air. Et puis j’entends un homme dire bonjour et une femme dire au revoir. J’entends un heureux ouvrir une canette de Coca et un malheureux ouvrir une canette de bière. J’entends quelqu’un de poli dire « pardon » et quelqu’un d’impoli dire « dégage ». Depuis ma fenêtre je vois des mauvais médicaments pour la santé et des bons médicaments pour la santé. Je vois des gens avec leurs costumes et des gens avec des vêtements sales. Je vois des personnes qui se marrent et je vois des personnes qui se séparent. Je vois la nouvelle vie d’un bébé et je vois la mort d’une personne.
Jenu, 3e4, Collège Jacques Prévert 

Pendant les cours je regarde par la fenêtre et la première chose que je vois est la liberté. Je vois des arbres poussés par le vent. Je vois des gens qui ont terminé avant moi et qui me font enrager. Je vois deux personnes qui se battent entourées par des idiots qui les poussent à continuer. J’entends des personnes rire. Je vois une moto qui essaye de faire des figures. Je vois des parents dans leurs voitures qui attendent leurs enfants. Je vois des gens qui attendent leurs amis. J’entends la sonnerie qui annonce la fin des cours. Je sors et je vois enfin cette fenêtre du dehors.
Laura, 3e3, Collège Théodore Monod  

A travers la fenêtre du bâtiment, je vois les petits de la cité se battre. Je vois la BAC qui ne fait que passer. Je vois le parking rempli. Je vois la voisine monter ses courses. Je vois les grands de ma cité faire de la moto. Je vois la BM-X6 des grands. Je vois les vieux parler. Je vois des tags sur les murs. Je vois la saleté sur la fenêtre. Je vois du béton. Je vois la nuit. Je vois les grands fumer. Je vois les petits monter sur les voitures sans pneus. Je vois aucune étoile…
Amine, 3e4, Collège Saint-Exupéry

FENETRES III


Depuis la fenêtre de mon ordinateur je vois mon fond d’écran : je vois une annonce publicitaire sur le coté : je vois l’icône « rechercher » : je vois une autre icône pour fermer la fenêtre : je vois un cheval de Troie qui entre dans mon ordinateur : je vois un film romantique sur un site : et des fenêtres porno qui s’ouvrent contre ma volonté : je vois toutes les pages avec un clic droit : je vois un clip musical sur You tube : je vois s’afficher des promotions : je vois les infos retransmises sur le site web de TF1 : je vois les résultat des courses de Vincennes : je vois mes dossiers : je vois des chats : je vois des cybers s’introduire dans mon ordinateur – ma vie privée : je vois des personnes sur face book : je vois la température du thermomètre qui baisse.
Arthur, 4°6, Collège Le Parc

La fenêtre dans laquelle j’aimerais voir c’est celle qui s’ouvre sur le cœur des gens pour savoir pourquoi ils dépriment quand il le font… Pourquoi ils sont joyeux quand ils le sont. J’aimerais voir le cœur des gens d’un peu plus près, voir tous leurs sentiments. J’aimerais mieux comprendre le cœur des hommes. Il y a des cœurs qui ont une fenêtre sale. D’autres ont une fenêtre propre avec des vitres clean mais avec des volets fermés…
Sully, 3e4, Collège Saint-Exupéry

Depuis la fenêtre du RER tu vois les horaires des prochains trains. Le train bouge et tu ne vois plus la gare. Tu vois un espace vide. Tu vois la voie ferrée. Tu vois de la verdure et très loin des immeubles. Et puis tu ne vois plus rien. C’est un tunnel. Désormais tu ne vois vraiment rien à travers cette fenêtre. Tout est noir. Maintenant tu ne vois plus rien.
Katharina, 3e4, Collège Jacques Prévert 

Je vois Franprix à 9h00 quand il ouvre ses portes avec des dames qui attendent depuis une demi-heure – elles n’ont toujours pas compris qu’il ouvre à 9h00 et pas à 8h30. Je vois un Roumain qui va chercher sa voiture dans le parking, il a une canne à pêche avec lui. Quatre heures plus tard il revient énervé de n’avoir rien pêché. Ça me fait rire. Je vois la vieille dame qui sort de chez elle avec plein de sacs et qui parle toute seule car elle est folle. Puis, deux minutes plus tard, elle revient car elle rate toujours le 214. Il est 20h00 et le Franprix va fermer. Je vois des voitures : je ne sais pas d’où elles viennent ni où elles vont. Enfin, je vois la lune qui me prévient qu’il faut fermer la fenêtre et partir.
Bouzned, 3e3, Collège Théodore Monod  

FENETRES IV



D’une des fenêtres du bateau Vogue Merry, je vois le pont du bateau, les portes des chambres, le vaste océan, les mouettes, la porte de la cuisine et de la salle à manger. Je vois aussi Zoro qui dort comme d’habitude sur le pont, Nani qui surveille la mer, Usopp qui essaye d’inventer quelque chose, Sandy qui cuisine des plats délicieux, Tony Tony Chopper qui essaye d’inventer des médicaments (il est docteur), Robin qui lit sur le pont à bronzer, Franky qui reconstruit le lit cassé, Brook qui chante en jouant du violon et Luffy en train de manger tout en jouant à la balançoire. Sur l’océan il y a les mouettes, un petit vent salé et d’autres bateaux…
Coralie, 3e4, Collège Saint-Exupéry

Depuis la fenêtre de ta chambre tu vois une personne qui fait du I en YZF. Tu vois passer des voitures. Tu vois une benne à ordures. Tu vois des personnes qui gaspillent la nourriture. Tu vois un grec. Tu vois une personne qui perd la tête. Tu vois un aéroport. Tu vois une ferme de porcs. Tu vois la gare. Tu vois qu’il n’est pas trop tard : il y a des gens qui mangent des chips, d’autres qui pissent et tout un groupe qui est posé devant un bâtiment. Tu vois aussi un parking et des gens qui tiennent des kalachnikov.
Ibrahim, 4°6, Collège Le Parc

Depuis la fenêtre de ma vie je vois la vie. Ma naissance et l’innocence. La fierté dans les yeux de mes parents. Mes siestes au creux des bras de ma maman. Je vois mon baptême. J’entends leurs je t’aime. J’aperçois mes premiers pas et je guette mes 48 mois. Je vois l’adolescence, l’alcool et la démence. Je vois mes 18 ans et regrette mes 4 ans. Je perds ma virginité et mon être aimé. Je vois arriver mon indépendance et je replonge dans la démence. Je vois arriver mon rêve et j’entends la foule m’acclamer. Je guette ma trentaine et vois arriver les problèmes. Je plonge dans la ménopause. J’entends des plaintes. Des peurs. Des craintes. J’aperçois la mort et cela crée le désordre : je vois arriver la fin… Alors je revois toute ma vie depuis ma naissance et je regrette mon innocence.
Frédérique, 3e4, Collège Jacques Prévert 

Je vois la gare SNCF du Chenay-Gagny, là où tous les jeunes passent leur temps à fumer et boire. J’ai vu les émeutes d’il y a quelques années, la fumé des voitures brulées et les tirs des flash-balls. Je vois un match de foot au City Stade. Je vois un groupe de jeunes qui insultent la B.A.C. Je vois des vendeurs à la sauvette qui fuient dès qu’il voient la police. Je vois une bagarre entre de petits noirs pour un ballon. Je vois une femme qui vient de se faire voler son Iphone. Je vois des mères qui crient les noms de leurs fils pour qu’ils rentrent. Je vois des éboueurs qui bâclent leur travail. Une classe d’EPS qui va au Stade. Je vois la fête chez les voisins d’en face. Je vois ma voisine à moitié nue qui sort de sa douche. Je vois un train qui ferme ses portes après le signal sonore. Je vois une gare vide. Je vois la police en patrouille qui cherche le flagrant délit…
Joury, 3e3, Collège Théodore Monod  

FENETRES V


Je vois deux mendiantes par terre qui discutent, adossées à la façade d’une boulangerie. Je vois des gens qui font la queue dans cette même boulangerie, ne jetant même pas un coup d’œil à ces deux femmes. Je vois le matériel des techniciens. Je les vois en train de se dépêcher pour installer ce qu’il faut pour tourner la scène. Plus loin je vois la place de la République. D’autres mendiantes. Le chien d’un clochard. Je vois une petite tente. Je vois des ordures sur le sol, des bancs et des oiseaux. Je vois la tente de la cantine installée sur la place. Je vois une dame qui s’arrête, regarde l’heure et repart. Je vois un SDF qui demande du rab au cuisinier. Je vois la vie qui grouille de partout. Je vois la nuit qui tombe. Je vois le 83 qui arrive.
Betty, 3e4, Collège Saint-Exupéry

Depuis la fenêtre de ma salle de classe je vois la clinique qui lâche un grand nuage de fumée. Je vois un camion d’ambulance s’arrêter aux urgences pour déposer un blessé. Je vois une classe de 3ème faire du baskets sur le toit du gymnase. Je vois un garçon courir car il est très en retard. Je vois une vieille dame aller au marché faires ses courses au lieu de dormir. Je vois un chômeur acheter de cigarettes au lieu de trouver du travail. Je vois un policier mettre un P.V. à une voiture mal garée. Je vois une centaine de pigeons posés sur le toit du collège. Je vois un chien faire ses besoins dans le bac à sable. Je vois l’annexe où il y a le bureau du Principal. Je vois un petit de 6ème en train de pleurer dans le bureau du Principal parce qu’il s’est bagarré. Je vois le restaurant ouvrir son store un peu en avance. Dans la clinique, je vois une femme qui va se faire opérer et qui croit qu’elle va mourir. Je vois une affiche publicitaire qui gâche le paysage…
Camil, 4°6, Collège Le Parc

Depuis la fenêtre du Commissariat tu vois des policiers partir en patrouille. Tu vois un couple de guadeloupéens embarqué pour violence conjugale. Tu vois une vieille dame aller porter plainte pour vol. Tu vois une enfant avec sa mère porter plainte pour pédophilie. Tu vois une adolescente porter plainte pour viol. Tu vois une dizaine de sri-lankais être embarqués direction l’aéroport. Tu vois une mère pleurer pour l’incarcération de son fils.
Kader, 3e4, Collège Jacques Prévert 

Depuis la fenêtre du TGV après être monté je vois des retardataires se jeter dans le train alors que c’est la fermeture des portes. Je vois les trains sur les autres voies. Je vois les quais qui commencent à défiler lentement sous mes yeux. Je vois de nouveaux retardataires râler car ils ont loupé leur train alors qu’en général ils râlent parce que les trains sont en retard. Je vois un groupe d’agents de la SNCF avec les gilets oranges. Je vois une locotracteur rouler dans l’autre sens. Je vois le poste d’aiguillage. Je vois, depuis un pont donnant sur un boulevard parisien, des policiers poursuivre une Mitsubishi noire. Je vois un train de banlieue. Je croise un fou échappé d’un asile psychiatrique se balader et danser sur les voies alors qu’un autre TGV arrive sur lui… Je vois le noir d’un tunnel. Je vois d’un seul coup le paysage changer : avant le tunnel c’était la banlieue aux immeubles et aux murs tagués, et en sortant du tunnel je vois un paysage magnifique aux champs de tournesols à perte de vue. J’y vois le vent faire onduler les fleurs : on croirait voir l’océan et ses vagues. Je vois un viaduc immense s’étaler sur le paysage. Je vois une gare quasi-déserte défiler. Je vois un grand fleuve où de petites embarcations se baladent. Je commence à voir le paysage défiler de moins en moins vite. Je vois une gare et j’entends « terminus, tout le monde descend ».
Alexandre Cadet, 3e3, Collège Théodore Monod